Après sa première au Canadian Film Fest en mars, la série dramatique, Du fleuve naissent les rivières (Streams Flow From A River), est projetée dans le cadre de Canneseries dans la compétition Séries courtes du festival! Pour souligner cette première internationale, nous tournons les projecteurs vers le producteur canadien sud-asiatique queer Shant Joshi, président de Fae Pictures. Grande nouvelle : Shant a été nommé cette année parmi les producteurs à surveiller au MIPTV, le marché de l’industrie qui se tient en parallèle.
Au Canada, la série de six épisodes est disponible sur Super Channel. Créée et réalisée par Christopher Yip, Du fleuve naissent les rivières relate l’histoire d’une famille d’immigrants canadiens d’origine asiatique. « On suit le père depuis son arrivée à l’aéroport au Canada et dans ses efforts pour trouver un emploi, puis son fils qui vit en ville et se bat pour boucler ses fins de mois, comme l’a fait son père avant lui », raconte le producteur âgé de 27 ans. « Les deux protagonistes ont frappé un mur et ils ne s’entendent pas, mais on comprend que leurs histoires sont assez semblables. »
D’où le titre.
Nous venons tous du même fleuve, mais nous suivons le cours de nos propres rivières, et nous devons nous regrouper pour trouver le rythme qui nous propulse vers l’avant. »
Des histoires diversifiées pour un « public millénarial diversifié »
« La série reflète la mission de Fae Pictures de décoloniser Hollywood et de faire une plus grande place aux histoires des communautés sous-représentées », explique Shant qui fait partie du comité consultatif de Future of Film Showcase et du comité sur l’ÉDI de la Canadian Media Producers Association, tout en étant le vice-président du conseil de BIPOC TV & Film. « Nous produisons du contenu que nous voulons voir à l’écran, en sachant qu’il y a un public pour ce genre de contenu. Si mon équipe et moi avons envie de le regarder, il doit y avoir d’autres personnes [qui en ont envie également]… C’est peut-être une mission un peu folle, mais nous étions tous en début de carrière et nous avions la possibilité de le faire, et nous sentions [qu’il y avait un besoin pour] une compagnie millénariale diversifiée qui s’adresse à un public millénarial diversifié. »
Leur approche se reflète aussi bien à l’écran que derrière. Par exemple, le journaliste de Variety Naman Ramachandran rapporte que 75 % de l’équipe de Du fleuve naissent les rivières est de descendance asiatique de l’Est et que, pour la première fois dans une série canadienne, l’équipe de scénaristes est entièrement d’origine asiatique.
Animés par la mission de « créer du contenu cinématographique pour, par et à propos des personnes queers, trans, noires et de couleur », Shant et ses collègues ont lancé Fae Pictures durant la pandémie et ont maintenant des bureaux à Toronto, Los Angeles et New York. Leurs projets à venir comprennent les longs métrages In Flames (film d’horreur sud-asiatique sélectionné dans la Quinzaine des cinéastes à Cannes) et Queen Tut (un film de drag queen révolutionnaire), qui sont financés notamment par Téléfilm. Et il ne faudrait pas oublier de mentionner une de leurs œuvres précédentes, International Dawn Chorus Day, qui a remporté le Teddy Award à la Berlinale.
Et il faut évidemment parler de Framing Agnes, un documentaire acclamé portant sur le legs d’une femme trans que la compagnie a réalisé avec le cinéaste Chase Joynt. Quand le film a été projeté en première (virtuelle) à Sundance en 2022, Shant et son équipe se sont rués dans les médias sociaux. Au vu des 5 000 places virtuelles à combler, « nous nous sommes dit, faisons appel à la communauté Twitter trans pour soutenir le film ». Pendant la projection, nous recevions des gazouillis de personnes qui réagissaient au film en temps réel. J’ai pensé « voilà la raison pour laquelle nous le faisons, pour cette personne qui regarde le film sur son ordinateur ou son téléviseur et reconnaît son expérience et se voit validée à l’écran pour la première fois ». (À Sundance, Framing Agnes a raflé le NEXT Audience Award et le NEXT Innovator Award).
Le parcours vers la production professionnelle
Né et élevé à Toronto, en regardant des films de Bollywood et de Disney, Shant avait constamment les yeux « rivés à l’écran », dit-il. « J’adorais pénétrer dans ces mondes fantastiques. » À l’école du cinéma de l’Université York, il est devenu le producteur d’une quinzaine de films étudiants. Prenant conscience qu’il aimait cela, et qu’il était bon dans ce rôle, que ce soit pour résoudre des problèmes, établir un calendrier ou un budget ou gérer des relations personnelles, il a commencé à travailler professionnellement. C’est alors que la question s’est posée : comment mener des productions qui ont du sens?
« Mes parents sont tous les deux des immigrants qui ont réussi et excellé dans leurs parcours professionnels », de déclarer Shant. « Puisque je suis à l’aise d’un point de vue socioéconomique, que puis-je faire pour améliorer la vie des autres? Je considère la capacité de faire des films et de raconter des histoires comme un privilège que je ne prends pas à la légère… Si je me contente de faire ce qui se présente à moi, est-ce que cela aura un sens? »
C’est ainsi qu’il a défini son intention. « J’avais besoin d’une étoile polaire. Elle a pris la forme de Fae et de sa mission, notre critère d’admissibilité, car nous voulions changer le monde avec nos histoires. »