Réponse : Le programme Talent tout court de Téléfilm Canada est de retour à Cannes, avec 11 cinéastes captivants à découvrir dans la mouture 2024.
Voici les détails :
J’ai d’abord été épaté par les angles et les cadrages inventifs de Catherine Boivin dans 6 minutes/km, son court métrage sélectionné pour le programme Talent tout court de Cannes il y a un an. Anotc ota ickwaparin akosiin, son film suivant, confirme ses talents de réalisatrice aux temps et aux intentions aussi variés que précis. Dans un cadre coupé en deux, nous voyons deux scènes de ménage. D’un côté, Boivin fait la vaisselle et la lessive ; de l’autre, sa fille joue avec ses jouets et s’amuse. Au-dessus de ces images, Boivin a une voix hors champ émotionnellement honnête dans laquelle elle s’adresse à sa mère. Avec des actions en miroir se déroulant des deux côtés de l’écran, ce court métrage est tout simplement remarquable.
En regardant Grandmothers, le court métrage de Millefiore Clarke retenu au festival de Clermont-Ferrand en 2022, j’ai eu l’impression que Clarke avait une sentimentalité de cinéaste curieuse, réfléchie et peut-être accablée par des questions encore plus importantes (de nos jours, qui ne l’est pas ?). Dans An Impression of Everything, sa nouvelle œuvre expérimentale, Clarke convoque ces émotions et, de manière impressionnante, assemble un ordre chaotique (parfois kaléidoscopique) à partir de séquences personnelles et de bobines d’archives assorties, distillant l’agitation du monde frénétique d’aujourd’hui dans un film au titre aussi approprié qu’ambitieux.
Tu devrais le prendre. »
Ça devrait être toi. »
Je cite régulièrement Two of Hearts de Mashie Alam depuis que je l’ai vu. Richement photographié à la Cressy House dans le bucolique comté de Prince Edward, en Ontario, ce bras de fer ludique entre frère et sœur ridicules est l’excuse parfaite pour qu’Alam joue à fond la carte des tableaux pince-sans-rire. C’est à la fois une séance de photos de mode à la Zoolander et un sketch de Saturday Night Live, qui s’amuse avec humour jusqu’à la révélation d’un délicieux partage.
Quelle est la structure la plus folle que vous ayez jamais vue à l’écran? À mon avis, c’est le four solaire de l’Ouzbékistan, une immense centrale électrique et une merveille architecturale composée d’espaces ouverts et de réseaux précis. Avec autant de panneaux dirigés directement vers notre étoile, c’est un endroit idéal pour réfléchir. Dans This World Does Not Fit Into My Eyes, une œuvre en noir et blanc des réalisateurs Felix Kalmenson et Rouzbeh Akhbari, nous passons du temps avec Nasira, une gardienne de l’immeuble qui, dans sa jeunesse, a connu une glorieuse carrière de chanteuse. Dans une scène clé, nous voyons Nasira se prélasser devant deux miroirs adossés l’un à l’autre; et lorsque Nasira les traverse, nous nous souvenons des nombreuses partitions qu’une vie peut contenir.
Dans le film drôle et touchant Anna’s Hands d’Ethan Godel, on lance l’idée depuis une vieille Toyota Tercel que prendre la route vers un chalet entre amis est synonyme de fête. Alors que trois compères roulent sur une autoroute de l’Ontario – hé, il y a un ONroute ! – les trois amis se livrent à une vaste conversation avec une verve rafraîchissante. Ils parlent de Dostoïevski, de Carver et des innombrables mystères de l’amour romantique, qui font écho aux non-dits qui se produisent dans la voiture. De quoi parle-t-on quand on parle d’amour? Des vertus de combiner les sandwichs McDonald’s, bien sûr!
Ernesto’s Bag renferme certainement un petit quelque chose. Dans le court métrage brillant et ironique d’Isabelle Deluce et Giulia De Vita, Ruth, une employée épuisée d’un magasin de robes de mariée est sur le point d’apprendre toute une nouvelle. Elle se trouve dans une situation délicate : Alice, sa meilleure amie, sa grande oreille pour les discours sur l’insipidité du complexe industriel de la mariée, va (surprise!) se marier avec… comment s’appelle-t-il ? Tim. Ruth, clairement, est super contente pour son amie et n’a pas du tout envie de tout gâcher. Mais après s’être adressée à Ernesto, un homme qui travaille dans une cuisine à côté de la boutique de mariage, Ruth reçoit la sagesse de son témoignage de pro-mariage et, bien sûr, le contenu de son sac – toute la magie dont elle a besoin pour dire « oui » à l’univers et être là pour son amie.
Avec Jamais nulle part, la réalisatrice Sophie Valcourt nous ramène sur la route, cette fois pour un voyage nostalgique non fictif vers Sept-Îles. L’autoroute n’est pas vraiment sujette aux beaux souvenirs, mais les longues étendues et le bruit persistant des arbres qui défilent forment une toile de fond apaisante pour un groupe d’amis, dont Sophie Valcourt, qui partagent des réflexions sincères sur le lieu, le sens du mot « chez-soi » et les bizarreries des vies partagées entre deux régions très contrastées. Lorsque ce court métrage chaleureux et méditatif atteint la Côte-Nord, une chose est sûre : l’écart entre l’endroit où nous sommes et l’endroit où nous sommes censés être est, comme toujours, transcendé par l’amitié.
Les forêts d’hiver ne sont pas aussi froides que les profondeurs de l’espace, mais le film rafraîchissant et poétique de Jean-Bastien Niyigaruye, Sirius, donne l’impression que le cosmos se trouve juste au-delà de l’horizon. Raconté en chuchotant et en voix hors champ, et avec une palette bleue glaciale qui refroidit et brûle à parts égales, nous voyons un homme dire à sa femme qu’il doit quitter leur cabane, mais qu’il reviendra. Alors qu’il marche sur la neige dans la forêt sombre, les constellations scintillant au-dessus de lui, son histoire s’intensifie pour devenir l’étoile la plus brillante de notre ciel nocturne.
Sujet : Joseph Édouard Beaupré. Taille : 8 pi, 3 po. Poids : 375 lb. Cause du décès : hémorragie pulmonaire consécutive à la tuberculose.
Le vrai Édouard, artiste de cirque dont le corps extraordinaire a été embaumé après sa mort en 1904, a fait l’objet d’un certain nombre d’actes posthumes. Il a été disséqué, exposé et expédié comme une énorme curiosité momifiée. Son immortalisation la plus récente est celle du Géant Beaupré d’Alain Fournier, une animation en image par image avec d’excellents accessoires et décors, sans oublier l’humour, et qui donne à l’histoire de Beaupré l’envol théâtral qu’elle mérite.
Ces neuf films, présentés dans la sélection des courts métrages de Cannes ainsi que lors d’une projection le 20 mai, sont suffisamment audacieux pour combler tous ceux qui prennent le temps d’aller les découvrir entre deux longs métrages du festival.
Faites-moi confiance, j’ai fait le calcul.
Les participants assisteront au Short Film Corner 2024. Pour plus d’informations, veuillez contacter : ann-marie.picard@telefilm.ca.
JAKE HOWELL
Jake Howell est un scénariste et programmateur de films de Toronto.