Dialogue avec des cinéastes autochtones

21 • 06

Le 21 juin est la Journée nationale des peuples autochtones, et pour l’occasion, nous avons approché trois cinéastes autochtones d’influence, et leur avons demandé de nous parler de cinéma, d’histoires autochtones, d’inspiration cinématographique, et plus encore. Voici la première partie de cet entretien extrêmement intéressant. Nous publierons la suite plus tard durant le mois, étant donné que juin est aussi le Mois national de l’histoire autochtone.

 

Sonia Bonspille-Boileau est une cinéaste mohawk primée ayant réalisé en 2015 son premier long métrage, Le Dep (financé par le Programme de production à micro-budget de Téléfilm), ainsi qu’un documentaire sur la crise d’Oka de 1990, The Oka Legacy. Elle travaille en ce moment à la réalisation de son prochain film Rustic Oracle.

Zoe Hopkins est une cinéaste britanno-colombienne de la nation Heiltsuk/Mohawk dont le long métrage Kayak to Klemtu a été lancé dans les salles de cinéma le 25 mai dernier. Ce premier long métrage fait suite à des courts métrages et des documentaires, incluant Mohawk Midnight Runners et le projet 360 Impossible to Contain.

Danis Goulet est une cinéaste (et responsable de la programmation canadienne du TIFF) de la nation Crie/Métis née en Saskatchewan, ayant réalisé les courts métrages primés Wakening et Barefoot. Elle travaille actuellement à la réalisation de son long métrage Night Raiders.

Le récit contribue grandement à garder la culture vivante.
Sonia Bonspille-Boileau

Sonia Bonspille-Boileau : « Le récit contribue grandement à garder la culture vivante. La tradition orale existe depuis des siècles dans les cultures autochtones; c’est dans l’essence même de notre identité. Mais selon moi, le cinéma est le véhicule parfait du récit, englobant toutes les formes de transmission (visuelle, orale), ce qui en fait un outil puissant pour partager la culture et exprimer différents points de vue. »

« Au-delà de ça, ce qui importe aujourd’hui, c’est notre façon de définir le récit autochtone. Le conteur est tout aussi important que l’histoire. Je crois que nous en sommes à l’heure où les conteurs autochtones sont en train de se réapproprier le récit. Le cinéma est une forme d’art consommée par les masses, et en ayant une voix pour raconter nos histoires par le biais de films captivants, forts, puissants et divertissants, nous pouvons réellement reprendre le contrôle de notre image dans les médias pour finalement refaçonner la relation entre les peuples autochtones et non autochtones. »

Zoe Hopkins : « Il est important de diversifier la culture représentée à l’écran. Imaginez un monde où les peuples autochtones feraient partie de la culture populaire à grande échelle. Je suis toujours étonnée de constater à quel point les gens en savent peu sur les Premières Nations, même sur des questions comme les pensionnats autochtones. Pourtant, ce n’est pas le seul sujet à connaître, ou à ne pas connaître. Notre culture et nos vies sont diversifiées. Il y a des milliers d’histoires autochtones à raconter. Et pourtant, peu de ces histoires ont été transposées au grand écran. Il est aujourd’hui important de raconter des histoires diversifiées – et des histoires autochtones – parce que la société est influencée par un cinéma historiquement homogène. »

Imaginez un monde où les peuples autochtones feraient partie de la culture populaire à grande échelle.
Zoe Hopkins

« Nous vivons à une époque où les femmes, les gens de couleur, la communauté LGBTQ et les peuples autochtones expriment le besoin de rééquilibrer les structures du pouvoir et la façon dont nous sommes reflétés à l’écran. La société reflète ces déséquilibres de façons violentes et injustes. La représentation est importante. Nous avons de belles histoires, de belles façons de raconter des histoires, et le grand écran est un espace où les rêves peuvent être racontés, où la magie peut se produire et où les histoires peuvent prendre vie. Nous avons des histoires qui remontent à nos premiers souvenirs en tant que peuples de l’Amérique du Nord. Nous avons la mémoire longue, et nos souvenirs ont été transmis de génération en génération. Quelle meilleure façon d’honorer ces histoires que de les raconter avec les moyens les plus innovants? Ces histoires trouvent un écho bien au-delà de nos propres communautés. Elles sont aimées de tous. Je suis ravie de voir cette route s’ouvrir au Canada. Nous sommes à l’aube de plusieurs nouvelles initiatives emballantes. C’est une époque merveilleuse pour faire du cinéma autochtone. »

Il n’y a jamais eu autant de films autochtones financés, et nous sommes à l’orée d’une ère incroyable pour le cinéma autochtone.
Danis Goulet

Danis Goulet : « L’auteur Thomas King a dit : “La vérité à propos des histoires, c’est qu’elles sont tout ce que nous sommes.” J’aime cette citation parce qu’elle démontre à quel point le récit est essentiel à nos cultures — et il n’y a rien de plus exaltant que de porter des histoires au grand écran. Pour ceux d’entre nous qui ont grandi en regardant toutes sortes de films qui jamais ne reflétaient nos réalités ou nos cultures, l’occasion de raconter nos histoires à l’écran dans un film est fantastique. Elle offre la chance de jouer un rôle clé dans la revitalisation de nos cultures et de bâtir un patrimoine culturel.

« Il existe aussi une occasion largement inexploitée pour le grand public de voir des histoires autochtones à l’écran. Les gens veulent voir des histoires uniques. Nos histoires sont riches, distinctives, et ont un potentiel infini de toucher et de divertir. Au fil des ans, j’ai vu des spectateurs être littéralement transformés par l’expérience qu’ils ont vécue en allant voir un film autochtone. Mais par le passé, nos histoires n’étaient pas très connues ou disponibles. Toutefois, nous nous trouvons à un moment charnière. Il n’y a jamais eu autant de films autochtones financés, et nous sommes à l’orée d’une ère incroyable pour le cinéma autochtone. »

Quelles sont les personnalités qui vous inspirent dans l’industrie?

Sonia Bonspille-Boileau : « Alanis Obomsawin, bien sûr. LA pionnière. Il y a tellement de femmes que j’admire : Andrea Arnold, Rachel Morrison, Micheline Lanctôt, Manon Barbeau, Sarah Polley, Léa Pool, pour n’en nommer que quelques-unes. Des personnes qui m’inspirent profondément au quotidien : Lisa Jackson, pour sa créativité, sa gentillesse, et sa sagesse. Taika Waititi pour avoir su transporter son indigénéité à Hollywood (en s’acceptant totalement) et en pavant la voie aux peuples autochtones derrière la caméra également. Xavier Dolan, pour son audace incroyable et son courage. Et parce qu’il trouve sans cesse des idées de films qu’il finit par réaliser. Comment fait-il? Et Karahkwenhawi Zoe Hopkins qui est pour moi un exemple lorsqu’il s’agit de concilier cinéma, maternité et enseignement de la culture et de la langue. »

Zoe Hopkins : « Je suis inspirée par mes collègues cinéastes, dont plusieurs élèvent de jeunes enfants tout en étant des leaders du cinéma autochtone : Danis Goulet, Alethea Arnaquq-Baril, Tasha Hubbard, Laura Milliken, Shane Belcourt, Lisa Jackson, Michelle Latimer, Michelle St. John, Marie Clements, Elle-Máijá Tailfeathers, Helen Haig-Brown et, bien sûr, la pionnière Alanis Obamsawin. »

Danis Goulet : « L’ancien directeur de la Cinémathèque du TIFF et nouveau directeur du Bureau des productions audiovisuelles autochtones, Jesse Wente. C’est un défenseur infatigable et brillant — et une encyclopédie vivante du cinéma. Il demeure l’une des figures de proue des dialogues les plus importants qui façonnent notre culture de l’écran, en plus d’être un leader éclairé qui apporte empathie et humanité à n’importe quelle discussion sur notre avenir. Je suis extrêmement heureuse qu’il ait accepté de diriger le tout nouveau Bureau des productions audiovisuelles autochtones, qui profitera non seulement à tous les cinéastes autochtones, mais au secteur tout entier. »

Lisez la partie 2 ici!

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